La Fondation LISEA Biodiversité a récemment inauguré à Poitiers son cycle de « Rencontres de la Fondation LISEA Biodiversité ». Objectif : faire un point d’étape par territoire sur les projets soutenus et permettre d’échanger entre porteurs de projets. Plusieurs projets, parmi les 30 soutenus dans la Vienne, ont ainsi été présentés, dont certains ont fait l’objet de visites sur le terrain. Retour sur cette journée riche en découvertes et partages.
Dans les couloirs et l’amphithéâtre de la Faculté des sciences fondamentales et appliquées de l’Université de Poitiers, il y avait, le 8 juin dernier, une ambiance très nature. Nombreuses associations, entreprises, chercheurs, fédérations, agriculteurs … évoluant autour de la préservation et de la conservation du patrimoine naturel et de la biodiversité s’étaient réunis à l’appel de la Fondation LISEA Biodiversité. Ce jour-là, elle a initié son cycle de rencontres (quatre sont attendues) dédiées aux projets soutenus sur les six territoires de la LGV SEA. Autant de points d’étapes et d’échanges sur les actions terminées ou en cours.
Favoriser la diffusion des connaissances naturalistes
C’est en effet tout l’objet de ces rendez-vous, comme l’a rappelé son président Hervé Le Caignec en ouverture de cette journée, tout en soulignant son engagement sur la longueur : « En matière de biodiversité, il est essentiel de favoriser la diffusion des connaissances naturalistes. Depuis 2013, par le soutien qu’elle apporte aux différentes structures agissant pour la biodiversité, la Fondation s’est donnée trois missions principales : améliorer les connaissances naturalistes ; restaurer les milieux et conserver les espaces ; sensibiliser le public. Un travail qui ne peut se faire que sur la longueur, c’est pourquoi LISEA Biodiversité, qui devait initialement terminer sa mission cette année, va la prolonger jusqu’en 2020. » Pour compléter et appuyer le propos, Lise Dauchet, responsable Mécénat à La Fondation, a rappelé plusieurs chiffres soulignant l’importance de l’investissement : « Une enveloppe de 5 M€, 105 projets soutenus fin mai à hauteur de 4 M€, 48 projets achevés, soit 2400 personnes mobilisées, 900 événements organisés regroupant 31 000 participants ou encore 600 publications. »
La journée, qui a accueilli près de 50 participants, était construite en deux temps : le matin, la présentation de projets et l’après-midi visite sur le terrain autour de deux circuits au choix pour les participants.
Restauration des habitats des milieux aquatiques
Pour conclure la matinée, la Fédération de pêche de la Vienne a exposé son projet d’étude diagnostic et de restauration des milieux aquatiques mené à partir de 2015 sur 20 ruisseaux. Objectif : connaître l’état des populations en poissons (notamment le plus emblématique, la truite fario), en écrevisses à pattes blanches et en insectes aquatiques. Le but était ensuite d’engager en fonction des résultats, les travaux de restauration qui s’imposaient sur ces cours d’eau. « Leurs caractéristiques et leurs états ont un impact direct sur l’habitat et donc sur la présence ou non des espèces », a précisé, Brice Nowosielski, chargé de mission à la fédération de pêche.
Après cette phase diagnostic, trois ruisseaux ont été restaurés (réduction de la largeur du lit mineur ; diversification des écoulements ; création de caches et de frayères à truites…) Ces trois rivières feront ensuite l’objet d’un suivi sur plusieurs années mais les premiers signes sont encourageants : « Il y a une autoépuration de l’eau, elle est plus claire, plus oxygénée. Tout est réuni pour que les espèces reviennent. »
Des retours d’expériences qui n’ont pas laissé de marbre l’assistance comme en témoigne Olivia Gautier propriétaire de l’hôtel-restaurant les Orangeries à Lussac-les-Châteaux, actuellement en cours de rédaction d’un projet Biodiversité sur son établissement. « Ce temps de rencontre a permis de souligner la richesse des projets et leur réelle nécessité vis-à-vis de la protection des milieux et des espèces. »
Deux circuits de visites
Après la pause déjeuner, les participants ont été invités à monter dans un bus pour suivre un parcours sur le terrain préalablement choisi. Le circuit 1 portait sur des visites autour des protections des busards en milieu agricole ; de l’implantation de jachères apicoles par les agriculteurs ou encore sur la restauration et la conservation de pelouses sèches. Quant au circuit 2, il a, tout d’abord permis, de découvrir le GAEC du Pré-Joly. Ce dernier, certifié bio en 2013, a engagé, en lien avec l’Université de Poitiers (laboratoire Ecologie et biologie des interactions) et le CIVAM (Centre d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture en Milieu rural), un travail conséquent autour de l’interaction bénéfique des mélanges des plantes pour les prairies semées et les fourrages dont les gains sont substantiel en terme financier, sanitaire et sur la qualité de la production laitière.
Le groupe s’est rendu ensuite à l’entreprise Aigle. L’occasion de constater l’importance des mesures engagées par celle-ci en matière de biodiversité sur son site de production. En effet, dans le souhait d’être en phase avec l’image très nature qu’elle développe, Aigle a mis en place, après un diagnostic, tout une série de mesures en faveur de la biodiversité comme : le fauchage tardif, la création d’une mare, des plantations d’arbres, la gestion des espèces envahissantes et l’implantation d’un sentier pédagogique pour les visiteurs.
Valentin Xavier, professeur à l’Université de Poitiers, porteur du projet Palaios (reconstitution des paysages passés suite à des fouilles réalisées en Vienne et Charente), participant de cette journée, estime que ces rencontres ont eu un double intérêt : « elles ont permis de pouvoir échanger avec d’autres participants sur des problématiques communes en termes de diffusion de l’information, de sensibilisation auprès du public mais aussi d’envisager des passerelles. Par exemple, des comparaisons entre les problèmes rencontrés aujourd’hui par les abeilles et l’état des populations il y a 120 millions d’années pourraient être réalisées. »
Un constat que partage la Fondation qui envisage d’ores et déjà d’organiser de nouvelles rencontres fin 2018.
Abeilles et Cistudes d’Europe à la loupe
Le premier projet présenté, mené en lien avec l’entreprise Entre Terre et Miel et le laboratoire Ecologie et Biologie des Interactions de l’Université de Poitiers, portait sur l’impact des pratiques agricoles sur les ruches d’abeilles domestiques. Objectif : comprendre la mortalité des colonies de plus en plus importante ces dernières années. « Les causes de mortalité, bien que multiples (pratiques agricoles, changements climatiques, nouveaux prédateurs…) ne permettent pas d’expliquer les mortalités de masse à grande échelle, a souligné Freddie Jeanne Richard, maître de conférences au sein du laboratoire. Dans le cadre de cette étude, notre souhait était de comparer l’état sanitaire et la productivité des colonies de différents sites. » Depuis trois ans, 12 ruches réparties sur trois secteurs représentatifs ont ainsi été suivies dans le cadre d’une étude de biosurveillance. Et les résultats sont étonnants par rapports au discours ambiant. « En effet, par l’application de mesures adéquates d’hygiène, d’apports nutritifs et de respect des traitements, il n’a été enregistré aucune mortalité exceptionnelle dans les colonies d’abeilles, au contraire les colonies vont bien et augmentent avec l’âge. »
Cette présentation a été suivie par celle d’une étude d’amélioration des connaissances sur la répartition de la Cistude d’Europe en Vienne réalisée par Vienne Nature. « Son objectif principal était de connaitre de manière plus fine la répartition de la Cistude dans le département de la Vienne, a noté Miguel Gailledrat, coordinateur de l’association. Cette étude a ainsi permis de confirmer sa présence sur de nombreux sites et d’en trouver de nouveaux mais aussi de mettre en place une gestion conservatoire durable dans un ensemble de sites assurant la préservation de ce reptile patrimonial. »